AVIS DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE
Le Conseil supérieur de la magistrature reçoit de l'article 64 de la Constitution la mission d'assister le Président de la République, garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire. Cette mission peut le conduire à faire connaître au chef de l'Etat, son président, son avis sur les questions relatives à l'indépendance de la magistrature.
Ainsi, après la création d'une juridiction de proximité par la loi du 9 septembre 2002, le Conseil supérieur de la magistrature émet l'avis suivant sur le projet de loi organique déterminant le statut des juges de proximité.
1. Se prononçant au regard de l'article 64 de la Constitution, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 29 août 2002, a subordonné la constitutionnalité de la création des juridictions de proximité à la condition qu'elles ne reçoivent qu'une part limitée des compétences dévolues aux tribunaux d'instance et de police.
Le Conseil supérieur de la magistrature prend acte de ce que le projet de loi organique fait référence à cette nécessaire limitation des fonctions des juges de proximité, et il attire l'attention sur le fait que toute extension des compétences de ces juges risquerait de remettre en cause la constitutionnalité de ce nouvel ordre de juridiction.
2. Le Conseil constitutionnel a précisé que la loi portant statut des juges de proximité « devra comporter des garanties appropriées permettant de satisfaire au principe d'indépendance, indissociable de l'exercice de fonctions juridictionnelles, et aux exigences de capacité qui découlent de l'article 6 de la Déclaration de 1789 ».
Si le Conseil supérieur de la magistrature estime suffisantes les conditions de diplôme et d'expérience professionnelle énoncées à l'article 41-17 du projet de loi organique, il considère que les dispositions de l'article 41-18 du projet sont insuffisantes pour s'assurer de la capacité du candidat à exercer les fonctions de juge de proximité. Il lui apparaît souhaitable de subordonner la nomination à l'accomplissement d'un stage probatoire, si le candidat n'a jamais exercé de fonctions juridictionnelles.
3. S'agissant des garanties propres à satisfaire au principe d'indépendance, qui comprend l'exigence d'impartialité, le Conseil supérieur de la magistrature considère que les membres des professions juridiques et judiciaires soumises à statut ou dont le titre est protégé par la loi ne devraient pas pouvoir exercer les fonctions de juge de proximité dans le ressort de la cour d'appel où ils ont leur domicile professionnel. Une telle restriction lui paraît commandée par le fait que ces auxiliaires de justice sont soumis à la surveillance, au contrôle et au pouvoir disciplinaire des autorités judiciaires de la cour d'appel où ils exercent. En outre, il serait indispensable que les juges de proximité qui exercent ces mêmes professions ne puissent accomplir aucun acte professionnel dans la circonscription territoriale du tribunal de grande instance dans lequel est située leur juridiction de proximité.
Ces règles d'incompatibilité géographique, plus larges que celle prévue à l'article 41-21 du projet de loi organique, seraient mieux à même de satisfaire aux exigences de la jurisprudence européenne relatives à l'impartialité objective du juge.
4. Enfin, en cas de pluralité de juges dans la même juridiction de proximité, il paraît indispensable au Conseil supérieur de la magistrature de prévoir un dispositif de répartition objective des juges et des contentieux de nature à assurer l'impartialité de la juridiction.