Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège
Le Conseil supérieur de la magistrature réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège, sous la présidence du premier président de la Cour de cassation, et statuant à huis clos ;
Vu les articles 43 à 58 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, complétée et modifiée par la loi organique n° 67-130 du 20 février 1967 ;
Vu les articles 13 et 14 de l’ordonnance n° 58-1271 du 22 décembre 1958 portant loi organique sur le Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu les articles 9 à 13 du décret n° 59-305 du 19 février 1959 relatif au fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu la dépêche de M. le garde des sceaux du 10 novembre 1970, dénonçant au Conseil les faits motivant la poursuite disciplinaire ouverte contre M. X, juge au tribunal d’instance de V ;
Sur le rapport de M. le président Derenne ;
Ouï M. X en ses explications et M. le bâtonnier Renault, son conseil ;
Considérant que M. X, juge d’instance à V, a été délégué au tribunal d’instance de W pour une durée de deux mois à compter du 16 septembre 1970 par ordonnance de M. le premier président de la cour d’appel de Y du 11 septembre 1970 ;
Considérant que :
1 - le mardi 22 septembre 1970, en arrivant au début de l’après-midi au tribunal d’instance de W où devait se tenir une audience de police, M. X a fait connaître au commissaire de police chargé du ministère public, au greffier et à deux avoués qui se trouvaient dans la chambre du conseil, qu’il ne présiderait pas l’audience, invoquant tout ensemble le préjudice qu’il aurait subi dans son reclassement indiciaire, le fait qu’il n’avait pas été donné suite à une demande de mutation et, essentiellement, la durée et la fréquence qu’il jugeait excessives de ses délégations à W ;
Que sur les conseils de l’un des avoués, il téléphona au premier président de la cour d’appel de Y ; qu’après un échange de propos qui de sa part se situaient, selon les propres termes du premier président, « à la limite de l’insolence », il accepta de tenir l’audience ;
2 - le jeudi 24 septembre 1970, invoquant cette fois l’irrégularité de l’ordonnance de délégation, au motif qu’il avait été précédemment désigné aux mêmes fins par une ordonnance dont les effets avaient expiré le 14 août l970, ce qui, selon lui, ne devait pas permettre au chef de la cour d’appel d’en prendre une nouvelle pour l’année en cours, M. X a cessé effectivement, par deux fois, d’assurer le service de la justice, le matin pour une audience civile, ce qui entraîna la remise de vingt affaires inscrites au rôle et de six jugements en délibéré, l’après-midi pour une audience du tribunal paritaire, d’où le renvoi à un mois des affaires qui devaient être jugées, dont un référé ;
Considérant qu’il n’appartenait pas à M. X de se faire juge de la régularité d’une ordonnance de délégation prise par le premier président en l’absence de toute réclamation des parties ;
Que ces faits sont graves, mais qu’il y a lieu cependant de tenir compte à ce magistrat du surcroît de travail et des fatigues que la vacance prolongée du poste de juge d’instance à W entraînait pour lui ;
Par ces motifs,
Prononce contre M. X la sanction disciplinaire prévue par le paragraphe 2 de l’article 45 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 modifiée (déplacement d’office).