Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège
Le Conseil supérieur de la magistrature réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège, sous la président du premier président de la Cour de cassation, et siégeant à huis clos ;
Vu les articles 43 à 58 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature complétée et modifiée par les lois organiques n° 67-130 du 20 février 1967 et n° 70-642 du 17 juillet 1970 ;
Vu les articles 9 à 13 du décret n° 59-305 du 19 février 1959 relatif au fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu la dépêche de M. le garde des sceaux du 12 février 1979, dénonçant au Conseil les faits motivant une poursuite disciplinaire contre M. X, juge à la suite du tribunal de grande instance de V, chargé d’assurer le service du tribunal d’instance de V ;
Ouï Mme le sous-directeur des services judiciaires qui s’est retirée après les débats ;
Et sur le rapport de Mme Guilhem, vice-président au tribunal de grande instance de Paris ;
Ouï M. X en ses explications ainsi que Me Lyon-Caen, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, et Me Bouvet, avocat au barreau de la Haute-Marne ;
Considérant qu’il résulte tant de l’instruction du dossier que des débats que M. X a été grièvement blessé à la tête à la suite d’un grave accident de la circulation en date du 15 octobre 1969 l’ayant obligé à interrompre ses activités jusqu’au 1er décembre 1970 ; qu’à cette date l’intéressé a tenu à reprendre son service au tribunal d’instance de V bien que le président du comité médical départemental ait alors fait connaître au président du tribunal de grande instance de V qu’il « n’était pas en état de reprendre ses fonctions » ;
Considérant, en outre, que M. X fait ressortir qu’il a été ultérieurement victime de deux autres accidents du travail : un de ces accidents étant survenu lors de l’incendie du palais de justice de V, lorsque la chute d’un moellon par ricochet se produisit sur ses vertèbres cervicales avec perte de conscience et placement à l’hôpital, l’autre étant survenu le 16 décembre 1978 alors que, présidant la commission de remembrement, il était tombé dans un champ ;
Considérant que seule une expertise médicale, au demeurant sollicitée par M. X, pourra déterminer si, et dans quelle mesure, le comportement de l’intéressé notamment en ce qui concerne son attitude à l’égard des justiciables et ses pratiques en matière civile ou pénale, a pour origine les séquelles des accidents dont il a été victime et si son état de santé actuel lui permet l’exercice normal de sa profession ;
Considérant, par ailleurs, qu’il y a lieu d’ordonner la mise à la disposition du Conseil supérieur de la magistrature de tout dossier médical pouvant intéresser ce magistrat ;
Par ces motifs,
a) Ordonnons la mise à la disposition du Conseil supérieur de la magistrature des dossiers de réforme médicaux concernant M. X ;
b) Avant dire droit, et, pour permettre de décider en toute connaissance de cause des conséquences disciplinaires du comportement de ce magistrat, ordonnons une expertise médicale qui sera diligentée par trois médecins experts inscrits sur la liste nationale : MM. les professeurs Thibault, Buge et M. le docteur Follin ;
Ces experts auront pour mission, après avoir examiné M. X, l’avoir entendu dans ses explications, et, avoir pris connaissance de son dossier disciplinaire et de tout dossier médical le concernant, de dire :
- si son état de santé lié aux séquelles de ses accidents, depuis le 15 octobre 1969, a été la cause du comportement qui lui est reproché ou si cet état de santé est de nature à atténuer sa responsabilité ;
- si l’état de santé actuel de M. X lui permet l’exercice normal de sa profession.