Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège
Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni à la Cour de cassation comme conseil de discipline des magistrats du siège, pour statuer sur la requête en nullité d’actes de la procédure disciplinaire suivie à l’encontre de M. X, substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de …, sous la présidence de M. Vincent Lamanda, premier président de la Cour de cassation […] ;
Vu les articles 43 à 58 modifiés de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;
Vu le articles 18 et 19 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature, modifiée par la loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu les articles 40 à 44 du décret n° 94-199 du 9 mars 1994, relatif au Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu la dépêche du garde des sceaux, ministre de la justice du 18 juillet 2006 dénonçant au Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, des faits motivants des poursuites disciplinaires à l'encontre de M. X actuellement substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de … ainsi que les pièces jointes à cette dépêche ;
Vu l’ordonnance du 27 juillet 2006 désignant M. Hervé Grange et M. Dominique Latournerie en qualité de rapporteurs ;
Vu le dossier disciplinaire de M. X mis préalablement à sa disposition ;
Vu la requête en nullité adressée le 11 juin 2007 par les conseils de M. X au président du conseil de discipline ;
Vu la lettre adressée le 20 juin 2007 par le président du conseil de discipline à M. Dominique Latournerie et à M. Hervé Grange ;
Vu la réponse du 21 juin 2007 portant observations de M. Latournerie et de M. Grange ;
Après avoir entendu M. Léonard Bernard de la Gatinais, directeur des services judiciaires du ministère de la justice, assisté de Mme Florence Butin et de Mme Béatrice Vautherin, magistrates à l’administration centrale du ministère de la justice ;
Après avoir entendu M. X en ses explications et moyens, M. … et M. …, avocats au barreau de …, et M. …, président du tribunal de grande instance de …, en leurs observations, M. X ayant eu la parole en dernier ;
Attendu que les conseils de M. X ont saisi le Conseil d’une requête en nullité d’actes d’instruction de la procédure disciplinaire suivie à l'encontre de ce magistrat, au motif que des actes d’instruction auraient été conduits sous l’égide des rapporteurs, par M. … alors conseiller référendaire à la Cour de cassation ;
Attendu que M. X sollicite l’annulation de « tous actes, y compris ceux dont il n’a pas connaissance, menés par M. … ou résultant des investigations de ce dernier, établis ou suggérés par lui, de la liste des questions établie à la suite de l’étude menée par M. … et mise à disposition des rapporteurs, des convocations qu’il a reçues pour des séances d’audition par les rapporteurs en vue de répondre à ladite liste de questions, et des procès-verbaux d’audition d’ores et déjà établis les 12, 13 et 14 mars 2007 » ;
Attendu que les articles 51 et 52 du statut de la magistrature précisent que le rapporteur désigné par le premier président procède à une enquête, qu’il entend ou fait entendre le magistrat poursuivi par un magistrat d’un rang au moins égal à celui de ce dernier et, s’il y a lieu, le plaignant et les témoins, et qu’il accomplit tous actes d’investigations utiles ;
Attendu qu’à l’appui de la saisine du Conseil, a été versé le dossier de la procédure d’instruction conduite par M. X qui présente une ampleur exceptionnelle nécessitant l’examen d’environ 30 000 pages sans inventaire détaillé, que le recours à un logiciel d’instruction assistée par un ordinateur pour permettre une consultation plus rapide des pièces et établir un lien entre les différentes données était de nature à faciliter le respect, par les rapporteurs d’un délai raisonnable au sens de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et de libertés fondamentales qui, bien que ne s’imposant pas aux procédures disciplinaires, est justement considéré comme une garantie essentielle du procès ;
Attendu que ce logiciel, d’une utilisation complexe ignorée des rapporteurs désignés, nécessitait une assistance confiée à un conseiller référendaire à la Cour de cassation et à un auditeur à la Cour de cassation affecté au service de documentation et d’études de celle-ci ;
Que cette assistance technique, assurée par des magistrats sous le constant contrôle des rapporteurs, ne méconnaît aucune des garanties dont doit bénéficier un magistrat faisant l’objet de poursuites devant le conseil de discipline dès lors que l’audition du magistrat poursuivi a toujours été faite par les seuls rapporteurs qui ont eux-mêmes arrêté le texte de chaque question ;
Qu’il s’ensuit que les rapporteurs n’ont pas délégué leurs pouvoirs, ni recouru à une mesure d’expertise ;
Que la préparation des auditions de M. X, sous le contrôle des rapporteurs, a permis la mise à sa disposition et à celle de ses conseils des pièces appelant les questions posées et la communication d’une information complète ;
Qu’il s’ensuit que le principe de la contradiction et les droits de la défense n’ont pas été méconnus ;
Attendu enfin que le grief, fondé sur le fait que les investigations actuellement menées par les rapporteurs porteraient sur la substance même de l’instruction dont les éventuels défauts sont étrangers à la matière disciplinaire en tant qu’ils ont pu être soumis au contrôle de la chambre de l’instruction, relève de l’examen au fond de la poursuite disciplinaire et non de celui d’une demande d’annulation d’éléments de l’enquête actuellement conduite par des rapporteurs ;
Par ces motifs,
Statuant publiquement le 26 juillet 2007, après débats à l’audience publique du 19 juillet 2007,
Rejette la requête.