S270 2/2025
CONSEIL DE DISCIPLINE DES MAGISTRATS DU SIÈGE |
Décision du 29 janvier 2025
N° de minute : 2/2025
DÉCISION
Dans la procédure mettant en cause :
M. X, magistrat honoraire, précédemment vice-président au tribunal judiciaire de XX,
Le Conseil supérieur de la magistrature,
Statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège,
Sous la présidence de M. Pascal Chauvin, président de chambre honoraire à la Cour de cassation, président suppléant du conseil de discipline des magistrats du siège, conformément à l’article 14 de la loi organique n°94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature,
En présence de :
M. Patrick Titiun,
Mme Diane Roman,
M. Didier Paris,
M. Patrick Wachsmann,
M. Christian Vigouroux,
Mme Catherine Farinelli,
M. Julien Simon-Delcros,
M. Jean-Baptiste Haquet,
Mme Clara Grande,
M. Alexis Bouroz,
Mme Céline Parisot
Membres du Conseil, siégeant
Assistés de Mme Sarah Salimi, secrétaire générale adjointe du Conseil supérieur de la magistrature, et de Mme Aurélie Vaudry, cheffe du pôle discipline ;
En présence de Mme Sandrine Branche, sous-directrice des ressources humaines de la magistrature de la direction des services judiciaires, représentant le garde des sceaux, ministre de la justice, assistée de Mme Anaëlle Louat, adjointe à la cheffe du bureau du statut et de la déontologie de cette même direction ;
Vu l’article 65 de la Constitution ;
Vu l’ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, notamment ses articles 43 à 58 ;
Vu la loi organique n°94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature, notamment son article 19 ;
Vu le décret n°94-199 du 9 mars 1994 relatif au Conseil supérieur de la magistrature, notamment ses articles 40 à 44 ;
Vu l’acte de saisine du garde des sceaux, ministre de la justice, en date du 26 janvier 2024 reçu le 30 janvier 2024, ainsi que les pièces jointes à cette saisine ;
Vu la décision du 8 février 2024 désignant en qualité de rapporteur, M. Patrick Titiun ;
Vu les dossiers disciplinaire et administratif de M. X mis préalablement à sa disposition ;
Vu les échanges de courriels relatifs à la transmission de la copie de la procédure disciplinaire à M. X ;
Vu l’ensemble des pièces jointes au dossier au cours de la procédure ;
Vu la convocation à l’audience du 9 janvier 2025 de M. X adressée par courrier recommandé avec demande d’avis de réception le 16 octobre 2024 à la première présidente de la cour d’appel de XX ;
Vu le procès-verbal de recherches infructueuses dressé par Maître B, commissaire de justice à XX, le 16 décembre 2024 ;
Les débats s’étant déroulés en audience publique, dans la salle d’audience de la chambre commerciale à la Cour de cassation, le 9 janvier 2025 ;
Après avoir entendu :
- M. Patrick Titiun, en son rapport ;
- Les observations de Mme Sandrine Branche, sous-directrice des ressources humaines de la magistrature, représentant le garde des sceaux, ministre de la justice, qui a demandé au conseil de rendre à l’égard de M. X un avis de refus de l’honorariat au regard de la situation de celui-ci.
A rendu la présente
DÉCISION
Sur la saisine du conseil de discipline
Par acte du 26 janvier 2024, reçu le 30 janvier 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice, a saisi la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège, en application de l’article 50-1 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature, de poursuites disciplinaires visant M X, alors vice-président au tribunal judiciaire de XX et depuis admis à faire valoir ses droits à la retraite.
L’acte de saisine impute à M. X les manquements suivants :
1- en ne procédant pas à la notification du droit au silence des prévenus lors de l'audience correctionnelle, et ce de manière systématique et volontaire, méconnaissant ainsi les dispositions du code de procédure pénale, en persistant dans cette attitude de manière inflexible, et ce alors même qu'il avait été rappelé à l'ordre à de nombreuses reprises par son coordonnateur, M. X a manqué à son devoir de légalité, de probité et aux devoirs de son état ;
2- en faisant état de jugements de valeur, de considérations personnelles déplacées dans la motivation des décisions du 2 septembre 2021 et du 15 novembre 2022, en employant l'ironie de manière vexatoire et dénigrante vis-à-vis du justiciable et de son conseil au sein de ces décisions, M. X a manqué à son devoir de délicatesse et de dignité ;
3- en affichant l'orientation de certaines de ses décisions en matière familiale avant de les avoir prononcées, et ce en présence des justiciables, en manifestant ostensiblement et de manière abrupte son désintérêt pour les plaidoiries des avocats, allant jusqu'à refuser de les écouter, donnant ainsi l’impression réelle ou supposée d'avoir déjà pris sa décision indépendamment des arguments des parties, M. X a manqué à ses devoirs d’impartialité et de délicatesse, ainsi qu’aux devoirs de son état ;
4- en tenant régulièrement des propos affaiblissant la portée de la décision de justice et la position des victimes, en adoptant des comportements méprisants et vexatoires vis-à-vis des justiciables et des auxiliaires de justice lors de ses audiences correctionnelles des 10 février et 10 mars 2022 notamment, M. X a manqué à son devoir de délicatesse et de dignité ;
5- en refusant d'entendre un prévenu ayant manifesté sa présence avant la clôture des débats au prétexte que celui-ci était arrivé avec quelques minutes de retard, en rendant un jugement contradictoire à signifier à son encontre et ce, en violation délibérée des droits de la défense et de l'article préliminaire du code de procédure pénale, M. X a manqué à son devoir de légalité, de probité et aux devoirs de son état ;
6- en adoptant publiquement l'ensemble de ces comportements de manière réitérée et sans véritable remise en question, M. X a porté atteinte à l’image de la justice.
A l’audience, M. X, régulièrement convoqué, n’a pas comparu.
Sur les faits à l’origine des poursuites disciplinaires
Les faits en cause se sont produits alors que M. X exerçait, au tribunal judiciaire de XX, les fonctions de vice-président délégué aux affaires familiales et de président du tribunal correctionnel statuant à juge unique.
Par courrier du 23 mars 2023, la première présidente de la cour d'appel de XX a alerté la direction des services judiciaires sur le comportement de M. X dans l’exercice de ses fonctions.
La cheffe de cour a indiqué avoir été saisie par le président de tribunal judiciaire de XX, suivant un rapport du 14 mars 2023 faisant état de plusieurs incidents lui ayant été signalés par la coordinatrice du service des affaires familiales, ainsi que par le barreau en novembre 2022, et mettant en cause le comportement professionnel de M. X tant aux affaires familiales qu’à l’audience correctionnelle.
Il ressort du rapport précité du président de la juridiction Bordelaise que, lors d’un entretien du 6 mars 2023, M. X a indiqué que les audiences se passaient correctement malgré quelques incidents avec certains avocats. Il a soutenu qu’il faisait preuve de souplesse et acceptait souvent les demandes de renvoi pour faciliter l'exercice des droits de la défense. Selon lui, les critiques des avocats à son égard concernant sa pratique qui était de s'adresser en tout premier lieu à leurs clients n’étaient pas fondées, s’agissant de la mission de conciliation du juge. M. X a néanmoins admis devant son chef de juridiction que le ton de ses décisions écrites pouvait être critiquable, tout en ajoutant que les propos devaient être pris dans un sens humoristique.
Le président du tribunal judiciaire de XX a précisé avoir procédé à un changement de service de M. X à la suite de cet échange, le magistrat se voyant retirer toute fonction à juge unique tant en matière civile que pénale au profit des fonctions de juge correctionnel en formation collégiale.
Par lettre de mission du 12 juin 2023, l’inspection générale de la justice a été saisie par le garde des sceaux aux fins de procéder à une enquête administrative sur le comportement de M. X.
Dans son rapport du 21 décembre 2023, l’inspection générale de la justice a conclu à la caractérisation, dans le comportement professionnel de M. X, des manquements déontologiques suivants :
- un manquement réitéré aux obligations de loyauté et de légalité, de surcroît de nature à porter atteinte aux droits fondamentaux des personnes poursuivies, en ignorant depuis septembre 2021, de façon volontaire et habituelle, l’obligation procédurale prévue à l’article 406 du code de procédure pénale relative à la notification aux prévenus de leur droit de se taire en qualité de président d'audiences correctionnelles ;
- un manquement réitéré à deux reprises à l’obligation de délicatesse à l’égard des justiciables et des auxiliaires de justice, par l’emploi dans deux décisions (un jugement du 2 septembre 2021 et une ordonnance du 22 novembre 2022) d’un ton vexatoire et de termes déplacés, dénigrants, disqualifiants, condescendants ou méprisants, qui ont porté atteinte à la considération et à la dignité des parties et de leurs avocats.
M. X a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er février 2024.
Par ordonnance du 8 février 2024, le premier président de la Cour de cassation, président de la formation du Conseil compétente à l’égard des magistrats du siège, a désigné M. Patrick Titiun pour procéder à une enquête et faire rapport au conseil de discipline.
De même que devant l’inspection, M. X n’a pas comparu devant le rapporteur malgré un premier report de la date d’audition à sa demande. M. Titiun a déposé son rapport le 15 octobre 2024.
Sur le fond
Sur les premier, deuxième et cinquième griefs
Aux termes des dispositions de l'article 43, alinéas 1 et 2, de l'ordonnance du 22 décembre 1958 modifiée, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2023-1258 du 22 novembre 2023 et applicable en la cause : « Tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute disciplinaire. Constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d'une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, constatée par une décision de justice devenue définitive. »
En vertu du principe vertu du principe constitutionnel qui garantit l’indépendance des magistrats du siège, leurs décisions juridictionnelles ne peuvent être critiquées, dans les motifs et dans le dispositif qu’elles comportent, que par le seul exercice des voies de recours prévues par la loi.
Le conseil de discipline des magistrats du siège ne peut apprécier un acte relevant de l'activité juridictionnelle d'un magistrrat qu'en cas de violation grave et délibérée d'une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, constatée par une décision de justice devenue définitive.
La juridiction disciplinaire ne saurait donc en connaître, sauf dans l’hypothèse prévue à l’article 43, alinéa 2, précité.
En l’espèce, en premier lieu, il est établi par les pièces de la procédure versées aux débats, en particulier par les constatations du président du tribunal judiciaire de XX et par celles de l’inspection générale de la justice, lesquels ont consulté les notes d’audience, qu’à plusieurs reprises, entre les mois de mars 2022 et de mars 2023, M. X n’a pas informé les prévenus de leur droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui leur étaient posées ou de se taire, en méconnaissance des dispositions de l’article 406 du code de procédure pénale.
Devant son président, M. X a admis une telle absence de notification, en soutenant, contrairement aux déclarations recueillies postérieurement par l’inspection, que nombre de ses collègues procédaient comme lui.
La méconnaissance, à plusieurs reprises, des dispositions de l’article 406 du code de procédure pénale par M. X s’analyse en une violation grave et délibérée par celui-ci d'une règle de procédure qui constitue une garantie essentielle des droits des parties.
Toutefois, faute d’avoir été constatée par une décision de justice devenue définitive, une telle violation ne peut être qualifiée de manquement de M. X aux devoirs de son état.
En second lieu, il résulte des pièces du dossier que, lors d’une audience du tribunal correctionnel qu’il a présidée le 24 novembre 2022, M. X, qui a débuté l’examen d’une affaire à l’ouverture des débats, soit à 13 heures 30, a refusé d’entendre le prévenu concerné qui a manifesté sa présence à 13 heures 43, motif pris de son retard, alors que les débats n’étaient pas clos, et a rendu par la suite un jugement contradictoire à signifier.
Aucune violation grave et délibérée d'une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, constatée par une décision de justice devenue définitive, n’est cependant établie.
De même, s’il ressort des pièces de la procédure que, lors de la même audience, M. X a d’abord refusé de recevoir des pièces d’un avocat au motif que celles-ci n’auraient pas été préalablement communiquées au greffe, le magistrat a, après l’intervention d’un vice-bâtonnier, accepté le dépôt de ces pièces, tout en déclarant ne savoir qu’en faire.
Là encore, aucune violation grave et délibérée d'une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, constatée par une décision de justice devenue définitive, n’est établie.
Aucun grief ne peut donc être retenu à l’encontre de M. X de ces chefs.
En troisième lieu, figure au dossier un jugement de divorce rendu le 2 septembre 2021 par M. X.
Cette décision comporte le passage suivant :
« Autres griefs invoqués par l'époux, Madame X,,, s'adonnerait à la voyance et à la magie noire, au point d'en avoir peur. Étant rappelé que l'époux apeuré est un ancien militaire, et qu'on l'imaginait autrement plus hardi, on ignore à quelle date celui-ci a pris la poudre d'escampette pour se réfugier dans les bras d'une autre, de sorte que, à supposer les faits établis, rien n’indique qu'ils étaient susceptibles de rendre intolérable le maintien de la vie commune, au sens de l'article précité. »
Figure également au dossier une ordonnance rendue le 15 novembre 2022 par M. X, en sa qualité de juge de la mise en état, dans une instance en divorce.
Cette décision comporte les passages suivants :
« d’autant plus que, comme pour l’ordonnance du Juge de la mise en état du 2 juin 2022, il [i.e. le requérant] persiste à demander - à titre subsidiaire - une baisse de sa contribution aux charges du mariage, alors que ladite ordonnance a rejeté sa demande pour rappeler qu’il n’est pas redevable d’une telle contribution mais d’une pension alimentaire au titre du devoir de secours, ce qui n’est pas tout à fait la même chose, et donc manifestement nous en concluons qu'il n'a pas lu la dernière ordonnance et son conseil non plus. « Errare humanum est, perseverare diabolicum »,
D’autre part, il persiste à présenter un certain nombre de charges qui viendraient en déduction de sa pension alimentaire, dont l’ordonnance de non-conciliation, déjà, a souligné que de multiples crédits immobiliers pour plusieurs résidences secondaires ne pouvaient revêtir un caractère prioritaire sur l’obligation alimentaire ; mais manifestement, lui et son conseil n'ont pas tenu compte des observations précédentes, ou ne les ont pas lues.
Enfin, signe encore évident de l'approximation de ce dossier, dans le bordereau de pièces, l'avis d'imposition portant sur les revenus de 2019 (pièce numéro 12) apparaît logiquement entre la pièce numéro 11 et 13, mais aussi, allez savoir pourquoi, entre la pièce 41 et la pièce 42, comme un intrus (ce qui prouve, s'il en était besoin que le dossier a été lu attentivement[2]...). »
Toutefois, ces considérations figurent dans une décision juridictionnelle, qui ne peut être mise en cause qu’en vertu de l’article 43, alinéa 2, précité.
Aucun grief disciplinaire ne peut donc être retenu à l’encontre de M. X de ce chef.
Sur les troisième, quatrième et sixième griefs
Aux termes des dispositions de l'article 43, alinéa 1er, de l'ordonnance du 22 décembre 1958 modifiée, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2023-1258 du 22 novembre 2023 et applicable en la cause : « Tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute disciplinaire. »
Tout manquement par un magistrat au devoir d’impartialité s’analysait, avant la loi du 22 novembre 2023, en un manquement au devoir de son état.
Le devoir de délicatesse qui s’impose au magistrat participe du devoir de respect, d’attention à autrui et d’humanité.
Le magistrat veille au respect de la dignité de la personne humaine.
En l’espèce, dans son rapport du 14 mars 2023, le président du tribunal judiciaire de XX a souligné qu’à l’occasion des incidents rapportés le 22 novembre 2022, la bâtonnière de l’ordre des avocats avait également signalé des difficultés récurrentes rencontrées par les avocats avec M. X dont le comportement à l’audience devenait inacceptable pour le barreau.
Les évaluations de M. X ont révélé que le magistrat avait adopté aux affaires familiales la pratique d’une présidence active l’amenant à donner la parole directement aux parties, y compris en cas d’assistance par les avocats, auxquels il concédait un temps de parole résiduel. Si cette pratique n’apparaît pas irrégulière procéduralement, l’enquête administrative a relevé le manque d’écoute et d’attention portée par M. X aux avocats et à leurs plaidoiries, lequel se manifestait parfois par un refus de les laisser plaider, exprimé soit de manière implicite soit de façon péremptoire.
En outre, selon certains avocats auditionnés par l’inspection générale de la justice, l’attitude de M. X à l’audience correctionnelle pouvait être ressentie comme la manifestation d’un préjugement du magistrat sur le dossier. En ce sens, une magistrate du parquet et une greffière du service correctionnel ont attesté que M. X ne cachait pas toujours son opinion pendant l’instruction des affaires.
Par ailleurs et surtout, la mission d’inspection a relevé l’usage par M. X d’un ton et d’un mode d’expression inadaptés, voire déplacés, à l’égard des parties lors des audiences des affaires familiales, se caractérisant notamment par des commentaires décalés, moqueurs ou dénigrants adressés à des justiciables se trouvant dans une situation douloureuse ou délicate au regard de la nature du litige.
Une attitude et un comportement de même nature ont été constatés en ce qui concerne la présidence des audiences correctionnelles par M. X.
C’est ainsi que l’enquête administrative a fait état du témoignage d’une magistrate du parquet, confirmé par celui de la greffière d’audience, selon lequel, lors d’une audience du 10 février 2022, M. X avait indiqué à un prévenu, après avoir rejeté sa demande de mainlevée d'une interdiction de contact avec la victime dans une affaire de violences conjugales, « qu'il était libre de ne pas respecter cette interdiction s'il avait suffisamment confiance en son épouse pour qu'elle ne le dénonce pas ».
Ce témoignage est venu conforter les doléances rapportées par des avocats et d’autres magistrats du parquet quant au positionnement institutionnel de M. X, s’agissant en particulier des commentaires de celui-ci à l’égard des justiciables, notamment de sexe féminin, dans le contentieux sensible des violences intra-familiales.
M. X a ainsi fait régulièrement preuve d’une attitude empreinte de légèreté et de familiarité, voire de banalisation des faits, qui s’est révélée très déstabilisante pour les justiciables dans le contexte de ces affaires humainement délicates.
De même, des témoignages versés au dossier ont fait état de propos ironiques voire blessants tenus par M. X à l’égard des prévenus comparaissant à l’audience correctionnelle.
Ce comportement doit être rapproché de la trop grande place accordée par M. X aux stagiaires qu’il accueillait en nombre à ses côtés et avec lesquels il se permettait des apartés ou faisait circuler des papiers pendant les réquisitions et les plaidoiries, une telle attitude ayant nécessairement été perçue comme un manque de considération du magistrat envers les débats.
Par son comportement et son attitude vexatoires, blessants, dénigrants ou méprisants, adoptés de manière habituelle à l’audience à l’égard tant des avocats que des justiciables, M. X a manqué aux devoirs d’impartialité, de délicatesse et de dignité.
Il a en outre gravement porté atteinte à l’image et au crédit de la justice.
L’ensemble de ces manquements caractérisent des fautes disciplinaires.
Sur la sanction
Au regard de la situation de M. X, actuellement en retraite, aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée par le conseil de discipline en application de l’article 43 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature, de sorte qu’il y a lieu d’ordonner la clôture de la procédure disciplinaire.
Conformément à la demande de la représente du garde des sceaux, ministre de la justice, le conseil recommande que, compte tenu de la gravité des fautes disciplinaires qu’il a retenues, l’honorariat soit refusé à M. X en application des dispositions de l’article 77 de l’ordonnance précitée.
PAR CES MOTIFS,
Le Conseil,
Après en avoir délibéré à huis-clos, hors la présence de M. Patrick Titiun, rapporteur ;
Siégeant en audience publique le 9 janvier 2025 pour les débats et statuant le 29 janvier 2025 par mise à disposition de la décision au secrétariat général du Conseil supérieur de la magistrature ;
Ordonne la clôture de la procédure disciplinaire engagée à l’égard de M. X,
Recommande que l’honorariat lui soit refusé en application des dispositions de l’article 77 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée, portant loi organique relative au statut de la magistrature.
La présente décision sera notifiée à M. X par courrier recommandé avec demande d’avis de réception à la première présidente de la cour d’appel de XX pour notification par la voie hiérarchique.
Une copie sera adressée par voie dématérialisée au garde des sceaux, ministre de la justice.
La secrétaire générale adjointe
Sarah Salimi |
Le Président suppléant
Pascal Chauvin |
Notifications
La présente a été envoyée, par LRAR et par voie dématérialisée à Mme la première présidente de la cour d'appel de XX pour notification par la voie hiérarchique à M. X
La présente a été envoyée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice par voie dématérialisée
Le 29 janvier 2025
Le greffier