Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège

Date
23/05/2002
Qualification(s) disciplinaire(s)
Manquement au devoir d’indépendance, Manquement au devoir d'impartialité, Manquement au devoir de fidélité au serment prêté (respect du secret des délibérations), Manquement au devoir de probité (obligation de préserver la dignité de sa charge)
Décision
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Mots-clés
Mise en examen
Trafic d'influence
Délibéré
Corruption
Indépendance
Impartialité
Secret des délibérations
Probité
Dignité
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Vice-président de tribunal de grande instance
Fonction
Vice-président de tribunal de grande instance
Résumé
Mise en examen d’un magistrat du chef de trafic d’influence pour s’être entretenu à diverses reprises avec un prévenu, entre l’audience à laquelle il siégeait et le prononcé du jugement, de l’affaire en délibéré
Décision(s) associée(s)

Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège, et siégeant à la Cour de cassation ;

Vu l’article 50 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifiée par la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992 ;

Vu la dépêche du garde des sceaux, ministre de la justice, du 17 avril 2002, proposant au Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline, d’interdire temporairement à M. X, vice-président au tribunal de grande instance de V, l’exercice de ses fonctions ;

Vu les avis du premier président de la cour d’appel de V du 10 avril 2002 et du président du tribunal de grande instance de V du 5 avril 2002 ;

Après avoir entendu, le 22 mai 2002, à 10 heures :
- M. André Gariazzo, directeur des services judiciaires, assisté de Mme Ghislaine Jaillon, magistrate à l’administration centrale du ministère de la justice ;
- Maître Marc Meisner, avocat au barreau de Paris, assistant M. X, qui a été entendu en ses explications et a eu la parole en dernier ;

Attendu que le 30 mars 2002, M. X, vice-président au tribunal de grande instance de V, a été mis en examen pour l’infraction de trafic d’influence par personne dépositaire de l’autorité publique : qu’indépendamment de l’évolution de la procédure pénale dans laquelle ce magistrat est en cause, il résulte des pièces du dossier, qu’ayant siégé à l’audience correctionnelle du 25 février 2002 lors de laquelle a comparu M. Y, maire de W, ancien secrétaire d’État, poursuivi pour abus de confiance, M. X a rencontré le prévenu à trois reprises entre l’audience et le prononcé du jugement, s’est entretenu avec lui de l’affaire en délibéré puis, à l’occasion de leur dernière entrevue, lors d’un déjeuner, a évoqué avec M. Y ses propres difficultés avec l’administration fiscale ;

Attendu qu’à eux seuls, de tels faits, non contestés par l’intéressé et rendus publics, caractérisent une situation d’urgence et commandent, dans l’intérêt du service, d’interdire à M. X l’exercice de ses fonctions jusqu’à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires ;

Par ces motifs,

Interdit temporairement à M. X l’exercice de ses fonctions de vice-président au tribunal de grande instance de V jusqu’à ce qu’intervienne une décision définitive sur les poursuites disciplinaires ;

Dit que cette interdiction cessera de plein droit de produire ses effets si, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, le garde des sceaux n’a pas saisi le Conseil supérieur de la magistrature dans les conditions prévues à l’article 50-1 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 relative au statut de la magistrature ;

Dit que copie de la présente décision sera adressée au premier président de la cour d’appel de V.