Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège
Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni à la Cour de cassation comme conseil de discipline des magistrats du siège, pour statuer sur les poursuites disciplinaires engagées par M. le premier président de la cour d’appel de W contre Mlle X, juge d’instruction au tribunal de grande instance de V, sous la présidence de M. Guy Canivet, premier président de la Cour de cassation ;
Vu les articles 43 et suivants de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;
Vu les articles 18 et 19 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature, modifiée par la loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu les articles 40 à 44 du décret n° 94-199 du 9 mars 1994, relatif au Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu la dépêche du premier président de la cour d’appel de W du 17 septembre 2003, dénonçant au Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline, des faits motivant des poursuites disciplinaires à l’encontre de Mlle X, juge d’instruction au tribunal de première instance de V, ainsi que les pièces jointes à cette dépêche ;
Vu la décision du 20 avril rendu par le Conseil supérieur de la magistrature, désignant le docteur Y pour procéder à l’examen médical de Mlle X et interdisant à l’intéressée l’exercice de ses fonctions au tribunal de grande instance de V jusqu’à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires engagées contre elle ;
Sur le rapport verbal de M. Philippe Mury, désigné par ordonnance du 4 novembre 2003 ;
Après avoir entendu M. Patrice Davost, directeur des services judiciaires, demander le prononcé d’une sanction de déplacement d’office assortie d’une interdiction des fonctions de juge d’instruction, puis Mlle X, assistée de Maître Myriam Falco-Mairat, avocat au barreau de Paris, en ses explications et moyens de défense sur les faits qui lui sont reprochés, Mlle X ayant eu la parole en dernier ;
Attendu qu’entre le mois d’avril 2002 et le mois de juillet 2003, au sein du tribunal de V ou à l’extérieur de celui-ci, Mlle X a été à l’origine d’incidents répétés liés à sa dépendance alcoolique, qui ont eu pour témoins des magistrats, des fonctionnaires, des auxiliaires de justice et des tiers, et à l’occasion desquels elle a donné, de sa personne et de l’institution judiciaire, une image dégradée ; qu’un tel comportement persistant en dépit des multiples mises en garde qui lui ont été faites, est constitutif d’un manquement aux devoirs de l’état de magistrat et de la dignité qui y est attachée ;
Attendu qu’aux termes d’un premier rapport, déposé le 4 juin 2004, l’expert a conclu que Mlle X était, depuis l’année 2000, atteinte d’une intoxication alcoolique dont il résultait une dépendance ayant provoqué des troubles du comportement ; que dans un rapport complémentaire, daté du 24 octobre 2004, il a relevé que l’état de santé de Mlle X s’était considérablement amélioré sur le plan clinique, paraclinique et psychologique, de sorte qu’une reprise de son travail était envisageable ;
Attendu que, tout en constatant l’amélioration de l’état de santé de Mlle X, le directeur des services judiciaires demande que les manquements professionnels commis par l’intéressée soient sanctionnés par un déplacement d’office assorti d’un retrait des fonctions de juge d’instruction ;
Attendu que, depuis sa première comparution devant le Conseil, Mlle X a consenti l’effort de suivre des soins et s’est soumise aux traitements nécessaires pour s’affranchir de son addiction à l’alcool ;
Attendu qu’en considération de l’ensemble de ces éléments doit lui être infligée la sanction disciplinaire du retrait des fonctions de juge d’instruction assortie d’un déplacement d’office ;
Par ces motifs,
Statuant en audience publique le 16 décembre 2004, pour les débats, et le 23 décembre 2004, date à laquelle la décision a été rendue ;
Prononce à l’encontre de Mlle X, par application des articles 45, 3°, et 2°, et 46, alinéa 2, de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, la sanction disciplinaire du retrait des fonctions de juge d’instruction assortie d’un déplacement d’office.