Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège
Le Conseil supérieur de la magistrature réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège et siégeant à la Cour de cassation ;
Vu l’article 50 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifiée par la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992 ;
Vu les articles 18 et 19 de la loi organique 94-100 du 5 février 1994 modifiée sur le Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu les articles 40 à 44 du décret 94-199 du 9 mars 1994 relatif au Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu la dépêche du garde des sceaux, ministre de la justice, du 13 septembre 2007, demandant au Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, d’interdire temporairement à M. X, vice-président chargé de l’instruction au tribunal de grande instance de …, l’exercice de ses fonctions ;
Vu les avis de la première présidente de la cour d’appel de … et du président du tribunal de grande instance de …, en date du 4 septembre 2007, exposant que, dans l’intérêt du service, il est nécessaire de prendre une telle mesure ;
Vu les pièces d’où il résulte :
1 - que M. X a pris connaissance le 26 septembre 2007 des termes de la saisine de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, du Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline,
2 - que M. X a pris connaissance de la dépêche du président du conseil de discipline des magistrats du siège en date du 29 septembre 2007, l’informant que le conseil se réunirait le 25 octobre 2007, à 10 heures à la Cour de cassation pour statuer sur la demande d’interdiction d’exercice des fonctions,
3 - que Me … a été convoqué par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, en date du 12 octobre 2007 ;
Après avoir entendu, le 25 octobre 2007 à 10 heures 15 :
- M. Pierre Bigey, sous-directeur de la magistrature au ministère de la justice, assisté de Mme Béatrice Vautherin, magistrate à l’administration centrale du ministère de la justice,
- Me … en sa plaidoirie,
- M. X en ses explications et qui a eu la parole en dernier ;
Attendu que le conseil de discipline a été saisi le 13 septembre 2007, par le garde des sceaux, d’une demande tendant au prononcé d’une mesure d’interdiction d’exercice de ses fonctions à l’encontre de M. X, vice-président chargé de l’instruction au tribunal de grande instance de … ;
Attendu que M. X a accumulé retards et carences dans le traitement des procédures d’information ouvertes à son cabinet ; que les notices transmises au président de la chambre de l’instruction mentionnent de nombreuses diligences dont la réalité ne serait pas avérée ; que sur 152 procédures en cours à son cabinet lors de l’intervention de l’inspection générale des services judiciaires, 106 dossiers étaient affectés de carences ou/et d’actes douteux ; que s’il a invoqué le fait qu’il avait repris en 1998 un cabinet qui n’était pas en bon état, il a admis des erreurs, des négligences et un manque d’organisation dans l’exercice de ses fonctions de juge d’instruction ;
Attendu que placé en congé maladie du 24 mai au 31 juillet 2007, il n’a pas repris son activité de magistrat instructeur au retour de ses congés annuels, son cabinet ayant été confié à un magistrat placé désigné par son premier président ;
Attendu que l’intérêt du service commande, qu’en urgence, un traitement adapté puisse être réservé aux procédures en cours au cabinet de M. X dont certaines comportent des détenus et d’autres seraient à la limite de la prescription ; que les retards et les carences dénoncés et admis par M. X sont de nature à entraîner des poursuites disciplinaires ; que ses supérieurs hiérarchiques ont sollicité le prononcé d’une mesure d’interdiction temporaire d’exercice ;
Attendu que la circonstance que M. X accepte d’être médicalement suivi et s’estime en état de reprendre une activité autre que celle de magistrat instructeur qu’il ne souhaite plus exercer, est inopérante dès lors que son autorité et son crédit sont gravement compromis, plus particulièrement dans les fonctions spécialisées pour lesquelles il a été nommé par décret ;
Attendu que les conditions exigées par l’article 50 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 étant réunies, il y a lieu de prononcer la mesure d’interdiction temporaire requise ;
Par ces motifs,
Interdit temporairement à M. X l’exercice de toutes fonctions au tribunal de grande instance de … jusqu’à ce qu’intervienne une décision définitive sur les poursuites disciplinaires ;
Dit que copie de la présente décision sera adressée à la première présidente de la cour d’appel de … ;
Dit que cette interdiction cessera de plein droit de produire ses effets si, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, le garde des sceaux n’a pas saisi le Conseil supérieur de la magistrature dans les conditions prévues à l’article 50-1 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 relative au statut de la magistrature ;
Prononcé le 2 novembre 2007 par le Conseil supérieur de la magistrature réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège […].