Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège
Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège, et siégeant à la Cour de cassation ;
Vu l’article 50 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifié par la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992 ;
Vu la dépêche du garde des sceaux, ministre de la justice, du 13 septembre 1996, proposant au Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline, d’interdire temporairement à M. X, président de la chambre d’accusation de la cour d’appel de V, l’exercice de ses fonctions ;
Vu l’avis du premier président de la cour d’appel de V ;
Après avoir entendu :
- M. Philippe Ingall-Montagnier, directeur des services judiciaires au ministère de la justice, assisté de M. Yannick Pressensé, magistrat à l’administration centrale du ministère de la justice ;
- M. X qui n’a pas souhaité désigner un conseil, a reçu copie des pièces relatives à la poursuite disciplinaire le 16 septembre 1996, et a pu consulter l’entier dossier, à la Cour de cassation, le 18 septembre 1996 ;
Attendu qu’une information a été ouverte le 6 septembre 1996 au tribunal de grande instance de W à l’encontre de M. X, président de la chambre d’accusation de la cour d’appel de V, du chef d’agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans par personne ayant autorité ;
Attendu qu’en raison de « l’émotion importante » que cette situation a créée dans les milieux judiciaires de V, le premier président de cette cour a émis l’avis qu’intervienne à l’encontre de ce magistrat une interdiction temporaire d’exercice de ses fonctions, conformément à l’article 50 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 relative au statut de la magistrature ;
Attendu qu’il n’appartient pas au Conseil, dans le cadre de la présente saisine, de porter une appréciation sur la réalité des faits reprochés à M. X lequel, comme tout citoyen, bénéficie de la présomption d’innocence ;
Mais attendu que le placement en garde à vue de M. X puis l’ouverture d’une information contre lui ont été connues non seulement des magistrats de V mais également du public, informé par la presse écrite et audiovisuelle, tant locale que nationale ; qu’il est à craindre, dans ces conditions, que les débats devant la chambre d’accusation que préside M. X et, plus généralement, l’exercice de ses fonctions judiciaires donnent lieu à des remarques, voire des suspicions, qui nuiraient à la sérénité de la justice ; que M. X en est d’ailleurs convenu lors des débats devant le Conseil ;
Attendu dès lors que l’intérêt du service commande qu’il soit mis fin d’urgence à cette situation ;
Par ces motifs,
Interdit temporairement à M. X l’exercice de ses fonctions ;
Dit que cette interdiction cessera de plein droit de produire ses effets si, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, le garde des sceaux n’a pas saisi le Conseil supérieur de la magistrature dans les conditions prévues à l’article 50-1 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 relative au statut de la magistrature ;
Dit que copie de la présente décision sera adressée au premier président de la cour d’appel de V.