Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège
Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège, et siégeant à la Cour de cassation, sous la présidence de M. Pierre Truche, premier président de la Cour de cassation ;
En audience publique, conformément aux dispositions de l’article 6, § 1, de la Convention européenne du 4 novembre 1950, de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu les articles 43 à 58 modifiés de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;
Vu les articles 18 et 19 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu les articles 40 à 44 du décret n° 94-199 du 9 mars 1994 relatif au Conseil supérieur de la magistrature ;
Vu la dépêche de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, du 14 mai 1998, dénonçant au Conseil les faits motivant des poursuites disciplinaires à l’encontre de Mme X, juge au tribunal de grande instance de V, ainsi que les pièces jointes à cette dépêche ;
Sur le rapport de M. Henry Robert, désigné par ordonnance du 26 juin 1998, dont Mme X a reçu copie, et de la lecture duquel elle a dispensé le rapporteur ;
Après avoir entendu M. Bernard de Gouttes, directeur des services judiciaires, assisté de Mme Isabelle Douillet, magistrat à l’administration centrale du ministère de la justice ;
Après avoir entendu Mme X, assistée de Me Léon Lef Forster, avocat au barreau de Paris, en ses explications et moyens de défense, Mme X ayant eu la parole en dernier ;
Attendu que Mme X ne pouvant plus se procurer facilement un médicament anorexigène de type amphétaminique, dont elle usait depuis plusieurs années et dont elle estimait avoir besoin, a falsifié un imprimé à en-tête de l’hôpital Raymond-Poincaré de V pour fabriquer de mars 1996 à septembre 1997 de fausses ordonnances aux noms de médecins et de malades imaginaires et prescrivant ce médicament ; qu’elle a pu ainsi se procurer ce produit à plusieurs reprises mais que, dans d’autres circonstances, la vigilance des pharmaciens ne lui permit pas de parvenir à ses fins ;
Attendu que pour ces infractions aux articles 441-1 et 441-10 du code pénal, que Mme X reconnaît avoir commises, elle a été condamnée, par jugement contradictoire du tribunal correctionnel de W en date du 1er février 1999 et devenu définitif, à 5 000 francs d’amende avec exclusion de la mention de cette décision au bulletin n° 2 du casier judiciaire ; que ces faits constituent un manquement à la probité ;
Attendu, par ailleurs, que lors de la perquisition effectuée à son domicile pour découvrir les ordonnances falsifiées, furent retrouvés des revues, ouvrages, fascicules juridiques que Mme X dit avoir empruntés à la bibliothèque du palais pour rédiger ses décisions et n’avoir pu restituer à temps en raison d’un arrêt maladie ;
Mais qu’il n’est pas établi que Mme X ait voulu s’approprier ces documents ; qu’une faute disciplinaire n’est pas suffisamment qualifiée de ce chef ;
Par ces motifs,
Vu les articles 45, 2°, 45, 4°, et 46 de l’ordonnance du 22 décembre 1958,
Prononce à l’encontre de Mme X, pour les faits retenus comme constituant une faute disciplinaire, la sanction d’abaissement d’échelon assortie du déplacement d’office.